vendredi 19 avril 2013

Année noire pour le bâtiment !

Trimestre après trimestre, l’activité plonge dans l’artisanat du bâtiment. Un mouvement inexorable qui suscite l’inquiétude dans le secteur et fragilise toute l’économie de proximité.

"La chute de notre activité s’accélère, sans aucun espoir de reprise. Pour éviter le pire, nous attendons un signal politique fort, notamment pour ce qui concerne la construction de 500 000logements neufs et la rénovation énergétique de 500 000 logements existants annoncées par le gouvernement "s’alarme Patrick Liébus, président de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB). En 2012, selon notre Observatoire, les petites entreprises du bâtiment enregistrent une chute d’activité record avec - 4,8 % (contre + 4 % en 2011). Principaux métiers touchés par cette  tendance la menuiserie (-7,9% après +4,6 %), la peinture (- 7,1 % après +3,2 %), la plomberie (- 6,8 % après +0,2 %). Mais aussi des professions traditionnellement "solides" comme la couverture (- 5,1 %) ou la maçonnerie (- 4,6 %). Seules les petites entreprises de terrassement  (+ 3,9 %) et d’électricité (+ 0,9 %) affichent des performances positives, toutefois en net recul par rapport à l’année précédente (+ 7,8 % pour chacune d’entre elles). La note de conjoncture publiée en janvier 2013 par la CAPEB indique que l’activité a connu un recul brutal au 4ème trimestre 2012 (- 2,5 %).

"C’était le troisième trimestre consécutif avec un recul de croissance. Sur l’ensemble de l’année 2012, la perte globale d’activité est de 1 % en volume", précisent les analystes du service économique de l’organisation professionnelle. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces "chiffres noirs" du bâtiment. La diminution des permis de construire d’abord : en novembre 2012,  pour la première fois de l’année, le nombre de permis de construire déposés sur douze mois cumulés était en recul (- 1,4 %). Le marché de l’entretien – amélioration, habituellement relativement peu impacté par la conjoncture, est aussi en déclin avec - 1,5 %.  La mauvaise santé du marché immobilier, affaibli par la chute des transactions dans l’ancien (- 25 %), a également  participé  à l’effondrement de l’activité dans l’artisanat du bâtiment.

 

Taux d’accroissement du chiffre d'affaires

BÂTIMENT                 - 6,5 % (4ème trimestre 2012)
Couverture                                          - 3,4 %
Maçonnerie                                         - 7,1 %
Electricité                                            + 0,6 %
Plomberie-Chauffage-Sanitaire           - 6,2 %
Plâtrerie-Staff-Décoration                   + 2,3 %
Menuiserie                                          - 11,7 %
Carrelage-faïence                                 - 5,4 %
Peinture bâtiment                                - 11,2 %
Terrassements-Travaux publics           - 2,6 %

Taux d’accroissement du CA

BÂTIMENT   - 6,5 %                     2   012 / 2011           2011 / 2010
Couverture                                 - 5,1 %            +  2,9 %
Maçonnerie                                - 4,6 %            +  4,1 %
Electricité                                  + 0,9 %            + 7,8 %
Plomberie-Chauffage-Sanitaire - 6, 8 %           + 0,2 %
Plâtrerie-Staff-Décoration         - 0,8 %          + 13,4 %
Menuiserie                                -  7,9 %            + 4,6 %
Carrelage-faïence                       - 4,6 %            + 2,0 %
Peinture bâtiment                       - 7,1 %            + 3,2 %
Terrassements-Travaux publics + 3,9 %           + 7,8 %

 

Le bricolage dévisse

Véritable phénomène de société, le boom du bricolage ne profite pas aux magasins indépendants spécialisés dans la vente de fournitures et d’outillages. En recul de 9,4 % (contre+ 0,1 % en 2011), l’activité de ces petites surfaces dédiées au "faire soi-même" souffre de la concurrence féroce des grandes enseignes du secteur. Estimé à 22 milliards d’euros par la Fédération des magasins de bricolage et de l’aménagement de la maison (FMB), le marché est largement dominé par les GSB (+ de 400 m2) et la grande distribution. Riche en services associés, portée par un marketing agressif et une politique de prix discount, l’offre de ces grandes surfaces laisse de moins en moins de places aux indépendants du secteur…

 

ChristianeCOMPANY
Présidente de la Fédération des centres de gestion agréés

L’Observatoire de la Petite Entreprise (OPE) : Quel bilan peut-on dresser de l’activité des petites entreprises en 2012 ?

Christiane COMPANY :
L’année 2012 marque un tournant préoccupant dans la vie économique des petites entreprises. Alors que ces deux dernières années laissaient espérer une reprise durable de l’activité, après une amélioration de la conjoncture en 2010 (- 0,7 %) et un net rebond en 2011 (+ 1,9 %),l’année 2012 est clairement une année noire pour les TPE. Tous les secteurs d’activité sont touchés, plus ou moins sévèrement, par la crise. Ce qui se traduit par un indice moyen d’activité en recul de 2 % (contre + 1,9 % en 2011). La principale source d’inquiétude est l’effondrement de l’activité dans l’artisanat du bâtiment (- 4,8 %) dont chacun connaît le rôle moteur pour l’ensemble des petites entreprises. Le bilan 2012est donc négatif et les premières projections pour 2013 ne sont guère rassurantes…La rupture de cycle est désormais nette et on peut malheureusement redouter un impact important sur l’emploi. Même si le phénomène est moins médiatisé que les plans sociaux qui frappent, par exemple, l’industrie automobile, la hausse constante du chômage concerne également nos petites entreprises. Ainsi, si cette mauvaise conjoncture perdure, elle entraînera, dans les 12 à 18 prochains mois, la destruction de dizaines de milliers d’emplois dans l’artisanat et le commerce de détail. Je tiens, dans ce contexte extrêmement difficile, à rendre hommage au courage des entrepreneurs qui affrontent, souvent seuls, cette forte dégradation de la conjoncture.

OPE : Quelles sont les tendances sectorielles que nous pouvons néanmoins retenir ?

Christiane COMPANY :
Incontestablement, le principal enseignement de notre étude concerne l’important recul d’activité observé dans l’artisanat du bâtiment comme je le disais à l’instant. Toutes les professions du secteur présentent des chiffres d’affaires en net repli par rapport à l’année précédente.
Avec des chutes vertigineuses dans la menuiserie (- 7,9 %, contre+ 4,6 % en 2011) ou la peinture (- 7,1 %, contre + 3,2 % en 2011).Même des professions traditionnellement insensibles aux retournements d’activité, comme la couverture (- 5,1 %) ou la maçonnerie (- 4,6 %), sont dans le rouge !L’autre tendance qu’il convient de souligner, c’est la résistance des commerces alimentaires dont nous avons déjà souligné, dans nos enquêtes, la formidable capacité à tirer profit de la conjoncture. Néanmoins, en 2012, le commerce de détail alimentaire est aussi durement secoué par la crise (+ 0,6 %, contre + 1,5 % en 2011). Mais, à l’exception des métiers de l’agriculture (+ 1,9 %) et des entreprises de transport (+ 0,8 %), c’est le seul secteur qui affiche une tendance relative positive. Les commerces de fruits et légumes, dont nous avons dressé le portrait économique dans notre précédente édition, réalisent notamment une belle performance avec un chiffre d’affaires en hausse de 2,2 %.

 OPE : Quelles sont les professions qui, malgré la mauvaise conjoncture, tirent leur épingle du jeu ?

Christiane COMPANY :
Contrairement aux années précédentes, peu de professions parviennent à développer ou même maintenir leur niveau d’activité dans un tel contexte. Même si, globalement, les commerces alimentaires "limitent la casse", ils ne retrouvent pas leur dynamisme des périodes antérieures. Nous avons aussi identifié, dans le secteur Culture et Loisirs, deux professions en croissance : les magasins d’articles de sport, pêche et chasse (+ 2 %, contre + 1,6 % en 2011) et, surtout, les studios photographiques (+ 3,7 %, contre - 7,4 % en 2011).En ce qui concerne ces derniers, l’adaptation de l’offre des magasins traditionnels aux nouvelles pratiques numériques des consommateurs (bornes interactives, albums personnalisés…) et la fin de la concurrence déloyale que leur imposaient 2000mairies sur le marché des photographies d’identité sécurisées(pour la délivrance des passeports) peuvent expliquer cette bonne performance.

Source : L’Observatoire de la Petite Entreprise - Mars 2013 - N°48

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